Dans le cadre de la campagne des 16 jours d’activisme contre les Violences Basées sur le Genre (VBG), les jeunes filles bénéficiaires du programme « The Sisterhood Table » ont tenu des échanges émouvants avec des jeunes filles et femmes déplacées de deux camps de la ville de Goma.
La première session de sensibilisation s’est tenue le 7 décembre dans le camp des déplacés de la 8è CPAC Mugunga, et la seconde à Kanyaruchinya. Elles ont réuni des hommes et des femmes déplacées autour des différentes formes de violences basées sur le genre dont sont victimes les personnes déplacées.
Après avoir défini les concepts et énuméré les formes de violences basées sur le genre, les sessions ont viré vers des échanges francs entre les jeunes filles et leurs mères autour des causes et conséquences des VBG, et essentiellement des violences sexuelles faites aux femmes dans les camps de déplacés.
Entre la pauvreté, les conditions de vie difficiles, la sous-information ainsi que le manque d’occupation dans leur situation de déplacement, les participantes se sont défoulées, exprimant ainsi leur vœu le plus cher : « Le retour au bercail ». Venues essentiellement du territoire de Masisi et Rutchuru, les participantes ont expliqué les différents défis auxquels elles font face, dans une ville où elles n’ont aucune activité génératrice de revenus.
« On se retrouve toujours en position de faiblesse lorsqu’on se rend compte qu’on a des multiples besoins non satisfaits », explique une participante, déplorant le comportement des leaders du camp qui usent de leur influence pour exploiter les jeunes filles déplacées.
Étant d’abord des victimes de la guerre, les femmes déplacées vivent généralement dans la crainte après avoir été victimes des VBG, les bourreaux étant, pour la plupart, des personnes influentes. Ainsi, les participantes aux dits échanges ont également appris des mécanismes de protection et de dénonciation afin de décourager ces actes qui ont déjà détruit des vies.
Un sentiment de satisfaction pour Aisha, jeune fille déplacée qui plaide pour des formations professionnelles afin d’autonomiser ses pairs et qu’elles subviennent à leurs besoins de façon propre. « Je ne savais pas qu’il était possible de dénoncer le viol sans se mettre en danger », nous a confié la ressortissante de la cité de Sake. « Nous avons des compétences et nous pouvons apprendre des métiers pour subvenir à nos propres besoins », plaide la jeune détentrice d’un diplôme d’État en section Nutrition.
Satisfaites de la qualité des échanges qui ont découlé des interactions entre les participantes et les organisatrices, ces dernières ont promis un plaidoyer auprès des autorités et différentes structures compétentes afin « d’équiper les jeunes filles déplacées de kits hygiéniques » pour réduire au mieux les risques de violences auxquelles elles sont exposées suite à la pauvreté.
Une action qui ne pourrait qu’atténuer la situation, nous a confié Grâce Ansima, une des organisatrices de ladite activité. « Pour éradiquer les violences basées sur le genre ici au camp, il faudrait que la guerre cesse, que chacun retrouve son milieu de vie naturel », a-t-elle soutenu.
Depuis décembre 2021, la résurgence des violences armées entre les forces rebelles et l’armée régulière a forcé des millions de personnes à quitter leurs demeures, un fait qui a exacerbé les violences basées sur le genre en province du Nord-Kivu, les femmes et les enfants étant la catégorie privilégiée sur la liste des victimes.
Alors que les violences se poursuivent et l’espoir d’un retour effectif de la paix ne cesse de disparaître, il convient d’intensifier les séances de sensibilisation sur la lutte contre les VBG ainsi que la santé sexuelle et reproductive afin de réduire les grossesses non désirées pouvant déboucher sur une génération d’enfants abandonnés, un danger de plus pour la société.
Joseph Katusele